Reika & Miyoshi
De la chance ? On pouvait dire ça. Alors qu’elle s’était promenée dans les couloirs la veille, elle avait réussi à intercepter une autorisation de sortie. Enfin, de sortie… Non. Disons plutôt, d’utilisation temporaire de matériel scolaire. Oui, voilà, c’était à peu près ça. Ce n’était pas du vol. Elle l’avait trouvé par terre, et il n’y avait pas de nom… Autant l’utiliser à bon escient. Et c’était ce qu’elle allait faire le lendemain…
Réveillée comme toujours à une heure trop matinale, elle avait mis quelques minutes à émerger de sa nuit. Cauchemars, pour changer. Ça en devenait lassant, presque… Il s’agissait toujours des mêmes choses, de répétitions incessantes. Il faudrait vraiment qu’elle prenne le temps de s’offrir un cours particulier, pour arriver à maîtriser un peu mieux son don. Ça devenait plus qu’urgent. Mais, ce n’était pas la journée pour ça. La belle avait déjà un programme prévu et pour une fois, elle allait s’y tenir.
Tout en se levant lentement, elle avait rapidement attrapé sa tenue scolaire. Un tour dans les douches avait suffi pour qu’elle soit habillée, coiffée et maquillée. Bottes montantes, chaussettes hautes noires couvrant la moitié de ses cuisses. Chemise blanche, jupe et veste grises. Et pour finir, cette simple cravate rouge, qu’elle attachait à la va vite, pour garder ce style d’étudiante un peu rebelle. Miyoshi gardait sa tenue d’été, alors que l’automne était bien présent. Autant au niveau température qu’environnemental. Mais, après tout, si elle n’avait pas froid, il n’y avait aucun intérêt à se couvrir un peu trop…
Ses cheveux longs descendaient en cascade jusqu’au creux de ses reins, et sa frange un peu en bataille suivait la ligne de la rébellion. Tandis que ses traits de crayons accentuaient son visage terrifiant… La décoloré adorait jouer ainsi de son corps, c’était amusant. Et puis au moins, les pensionnaires ne venaient pas lui chercher des problèmes. C’était bien là le plus important. Plus elle pouvait être seule, mieux c’était.
Pour finir, elle avait simplement glissé son couteau dans l’attache autour de sa cuisse. Et mis son téléphone dans la poche de sa jupe. Appareil électronique qui ne lui servait décidément à rien. M’enfin, elle le gardait toujours sur elle, au cas où…
Après avoir enfin terminé toutes ses affaires, la pensionnaire s’était dirigée vers l’extérieur du bâtiment. L’endroit où elle souhaitait aller faisait partie du complexe sportif. Au moins, elle ne pouvait pas critiquer ce point-là. Niveau matériel, ils étaient bien servis. Et c’était plus qu’agréable. Allumant alors une cigarette qu’elle avait glissée entre ses lèvres, Miyoshi s’était mise en route en suivant un petit chemin de gravier. Les feuilles tombaient toujours des arbres, laissant alors la pelouse se couvrir d’un petit manteau rouge et orangé. Le paysage était idyllique, on ne pouvait pas se le cacher. Et, l’italienne s’en réjouissait à chacun de ses pas.
Pas qui venaient enfin de la conduire proche de son lieu de prédilection en ce frais lundi matin. A quelques mètres, on pouvait déjà apercevoir un pré immense, parfaitement entretenu et tondu. Sur la droite, un grand bâtiment de pierres et de bois jonchait le chemin. Les écuries d’Aomori. Voilà où elle se trouvait, et voilà où elle allait passer une bonne partie de la journée. Ecrasant sa cigarette sous sa botte, elle l’avait ensuite jeté dans une poubelle, parce que oui, elle pensait même à l’environnement… Et puis, elle avait enfin poussé la grande porte. Jusqu’à tomber nez à nez avec une dizaine de box. En plus, ils n’avaient pas qu’un seul cheval… Et, au regard des noms, ce n’était pas non plus n’importe lesquels.
Le Pensionnat avait même le luxe de s’offrir des cheveux de prestige, qui avaient dû faire bon nombre de concours avant de finir ici… Dans son enfance, elle avait fait de l’équitation pendant quelques années, et… Elle espérait que le niveau allait encore être présent… Les protections, elle n’en avait que faire, c’était clair. Si elle tombait, tant pis. Quitte à s’ouvrir en deux. Si son destin était là, elle se pliait à lui. Tout ce qu’elle souhaitait, c’était monter à cheval, simplement. Et ce fut pour ça qu’elle s’avança jusqu’au dernier box, avant de poser son regard sur un étalon noir. Il était vraiment magnifique… Il venait d’être chouchouté, et il ne lui restait plus qu’à le seller, avant de pouvoir le monter. Esquissant un faible sourire, elle était entrée, afin de le mettre un peu en confiance…
Il fallait se montrer doux avec les chevaux, et celui-ci avait l’air d’être un peu têtu. Sa taille ne favorisait pas plus les choses, alors. Elle devrait se montrer vraiment prudente. Lentement alors, elle l’avait sorti, l’avait sellé, et l’avait longuement caressé le long du cou. Il avait mis quelques minutes à se calmer, mais, le plus dur avait été fait. Et tandis qu’elle tenait les rênes d’une main, elle entraînait sa monture vers le pré, pour pouvoir enfin se détendre.
L’heure de vérité approchait, et doucement elle avait inspiré longuement, avant de souffler sur le même rythme. Ce n’était pas de la peur, juste une faible appréhension. Finalement, l’équitation était un sport dangereux, et comme elle n’avait mis aucune protection en plus… Peu importe après tout. Doucement, elle était montée sur une barrière, avant d’enfin enjamber l’étalon. Cramponnée à la selle, elle avait fermé les yeux quelques secondes, avant de donner un sec coup de talon… Pour voir le paysage se mettre à bouger de plus en plus rapidement…
Sa crinière blanche se mélangeait avec celle ébène du cheval, tandis que le galop se prononçait… Ça faisait du bien. Et plus que ça encore.